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12 septembre 2007 3 12 /09 /septembre /2007 11:54

Nuno Oliveira (1925-1989)

 

nuno

 

Nuno Oliveira est considéré comme le maître équestre du XX siècle. Cet écuyer portugais subjugua autant les hommes que les chevaux. Il dispensa son enseignement à tous, aussi bien des cavaliers de concours que des cavaliers tauromachiques.

 

Véritable monstre sacré de l’équitation, Nuno Oliveira fut reconnu de son vivant comme LE maître équestre du XX siècle. Il enseignait une équitation pleine de tact et de douceur excluant tout recours à la force ou aux enrênements. Il proposait une équitation radicalement différente de tout ce qui se pratiquait à son époque et boudait les compétitions équestres. Il n’en devint pas moins l’un des cavaliers les plus célèbres du monde.

 

Biographie :

 Nuno Oliveira naît en 1925 à Lisbonne au sein d’une famille aisée, très francophone. A l’âge de sept ans il monte pour la première fois à cheval. Il pratique alors l’équitation chez son cousin Joachim Miranda. Il doit cependant attendre sa onzième année avant de recevoir directement l’enseignement de son cousin. Il devient très vite l’élève préféré de ce dernier. Il se voit de plus en plus confier le dressage des chevaux en haute école. Durant cette période Nuno Oliveira est également initié, par son père, à l’opéra, qu’il affectionnera par la suite, surtout les œuvres de verdi, jusqu'à sa mort. Nuno se révèle particulièrement sensible à la voix du ténor italien Lauri-Volpi, il dira même "ce fut Lauri-Volpi avec sa force morale, sa philosophie de l'éxistence et de l'être humain qui m'a le plus inspiré dans l'éxécution de mon art".

En 1940 tout semble s’arrêter pour Nuno, son maître, Joachim Miranda, meurt et son manège ferme. Nuno a passé son bac et ne jure que par l’équitation. Il travaille les chevaux de quelques bonnes familles et d’un marchand. Au départ il travaille dans les rues même de Lisbonne. Il est cependant rapidement installé par l’un de ses bienfaiteurs dans une écurie de la banlieue de la ville. Il est ensuite invité à produire ses chevaux pendant quelques semaines au Coliseo Dos Recreios, prestigieuse salle de spectacle de la capitale portugaise. Nuno se taille ainsi, progressivement, une réputation de dresseur averti. Lorsqu’il se marie en 1948, il déjà devenu, pour ainsi dire, le maître équestre portugais.

Sa réputation s’internationalise bientôt. Par ses publications d’abord, dont certaines, comme Haute école, sont publiée très tôt à l’étranger. Ces publications attirent très tôt des cavaliers étrangers, comme les époux Laurenthy ou encore Michel Henriquet chez le maître portugais. Puis en 1967 Nuno Oliveira donne ses premiers cours à l’étranger, en Belgique, ou il revient ensuite deux fois par an.

Peu après cela Nuno Oliveira décide d’ouvrir sa propre écurie, sa propre école. Il choisit pour ce faire une ancienne bergerie, à Aveçada, au nord de Lisbonne. Des cavaliers de toutes les parties du monde se pressent alors pour recevoir l’enseignement du maître. Ce dernier voyage plus que jamais afin de transmettre son savoir. En France, ou le colonel Durant l’invite à donner des leçons au Cadre Noir de Saumur, mais aussi en Australie ou au Pérou, pour ne citer que quelques exemples.

Nuno est un véritable bourreau de travail, qui de 6h du matin à 22h enchaîne dressage et débourrage des chevaux, leçons à divers cavaliers et écriture. Un rythme effréné qui s’avère usant. Alors que Nuno Oliveira a dépassé la soixantaine il va de plus en plus mal. Son dos est douloureux, son cœur s’affaiblit. Il est retrouvé mort dans sa chambre d’hôtel un matin de l’été 1989. Son Œuvre s’achève l’année suivante avec la parution posthume de son dernier livre Propos sur des croquis équestre, qu’il cosigne avec le sculpteur Jean-Louis Sauvat, dessinateurs des croquis et également l’un de ses élèves.

 

L’équitation de loisir au XX siècle :

 Le XX siècle marque la fin de l’emploi militaire du cheval. Lorsque Nuno Oliveira enseigne il n’y a plus dans le monde d’académie militaire qui perpétue l’art du dressage des chevaux, à quelques rares exceptions, comme le Cadre Noir de Saumur et l’école espagnole de Vienne. Mais cela s’avère bien trop limité pour transmettre l’art de monter à cheval à tout le monde, presque même pour assurer sa survie. La fin de l’usage martial du cheval marque aussi la fin de l’unité de l’équitation. Elle se trouve désormais segmentée en diverses disciplines, dressage proprement dit, saut d’obstacle, course, randonnée, équitation de travail, endurance, cross country et bien d’autres encore. Nuno Oliveira fait à son époque figure d’exception car il est un maître dans plusieurs disciplines parmi lesquelles le dressage et le saut d’obstacle.

Nuno Oliveira se distingue également de la majorité des cavaliers de son temps par son approche du dressage. Lui, comme les écuyers de l’école de Versailles, les classiques, les anciens, recherche le plaisir du cheval au travail, son expressivité. Il fait primer la beauté d’un exercice, la correction du mouvement, sur sa précision géométrique, sur son exactitude mathématique pourrait-on dire. Il développe ces idées au moment où le dressage, surtout de compétition, devient comme une mécanique extrêmement précise et monotone. Beaucoup de cavaliers professionnels travaillent des chevaux exceptionnels payés à prix d’or, récitant toujours les mêmes mouvements aux mêmes endroits, avec des tracés mesurés presque au centimètre près. Ils montrent toujours le même modèle de cheval, dans les mêmes allures, travaillées de la même façon. Nuno Oliveira recherche toujours les chevaux les plus difficiles, comme son cheval Suante, étalon extrêmement nerveux et presque incontrôlable, il cherche à les améliorer grâce à tous les airs possibles, pas seulement le piaffer, le passage ou la pirouette et entendant pouvoir les travailler où bon lui semble, pas seulement dans l’environnement aseptisé de la carrière de dressage. Il préfère un cheval rond et à l’aise sur des airs simples à des chevaux enfermés et forcé exécutant de gestes certes spectaculaires mais qui sont exécutés avec moult résistances de la part des chevaux.

Nuno Oliveira surprend par les chevaux qu’il monte. Il aime les chevaux lusitaniens en particulier et ibériques en général. Ces races étaient en vogue dans les cours d’Europe jusqu'à la fin du XVIII siècle, mais ont presque disparu des écuries de ce continent au milieu du XX siècle. Il les fait redécouvrir au monde entier.

On a reproché au maître Portugais de bouder la compétition de dressage, de dresser des chevaux ibériques, réputés faciles à dresser en haute école. On a taxé son équitation d’équitation de cirque, et on l’a finalement nommé équitation artistique, par opposition a l’équitation de concours, supposée plus sérieuse. Lui appelait son art équitation classique de tradition française. Il l’avait basée sur l’enseignement de son cousin, Joachim Miranda, et sur son immense culture équestre, dont les bases étaient La Guérinnière et Baucher, les deux principaux écuyers classiques français.

 

Les grands principes équestres d’Oliveira :

L’équitation de Nuno Oliveira est basée sur une synthèse entre la haute école classique du XVIII siècle La Guérinnière et les procédés très puissants et très particuliers inventés par Baucher au XIX siècle. Il disait au sujet de ce dernier écuyer, qu’il fallait le lire entre les lignes car son enseignement écrit ne se suffisait pas à lui-même. Le maître portugais refuse pour autant de s’enfermer dans un système. Pour lui le physique et la psychologie de chaque cheval sont uniques et appelle donc un dressage unique. Le dressage selon Nuno Olveira se caractérise avant tout par une recherche constante de la légèreté. Les aides, mains, jambes, doivent devenir le plus limitées possibles, jusqu'à être presque inexistantes. Il faut rechercher une impulsion, un calme et un équilibre toujours plus importants. « Des chevaux de feu que l’on conduise avec un fil de soie » disait-il.

Le principe fondamental du maître est que le cheval doit ressentir en permanence le même plaisir au travail que le cavalier. La beauté, l’aisance d’un mouvement pour le cheval prime donc logiquement sur sa précision géométrique. L’équitation devient donc plus un art qu’un sport.

Le facteur permettant d’obtenir cette légèreté, cette « difficile facilité » qui caractérise les plus grands écuyers, réside, au-delà d’une gymnastique et d’une progression judicieusement pensée, adaptée au cheval, dans la position du cavalier. Cette dernière doit être souple et liante. Les deux points importants dans cette position pour le maître portugais sont le dos et les jambes. Le dos est selon Nuno « comme le fléau d’une balance qui permet au cavalier de répartir le poids du cheval selon son gré ». Pour Oliveira, le rassemblé et tous les mouvements possibles a cheval naissent de l’emploi et de la position correcte du dos. Les jambes elles doivent être placées d’une manière que l’on enseigne plus aujourd’hui. En effet les genoux doivent être collés dans la selle. Ceci permet d’affiner l’action des jambes et d’assurer une position correcte du dos. Pour Nuno Oliveira le tact des jambes est aussi important que celui de la main et un cavalier monte bien parce qu’il a une bonne jambe. La position à cheval est tellement importante pour le maître portugais qu’il dit même que « la haute école est à la portée de tout cavalier ayant une position en selle correcte ».

 

Lorsqu’il meurt à 64 ans, Nuno Oliveira laisse derrière lui une œuvre immense. Plus d’une douzaine d’ouvrages, des dizaines de chevaux dressés et des milliers d’élèves. Tous colportent son enseignement, ses sentences, partout dans le monde. Grâce au maître l’Europe entière redécouvre les chevaux ibériques et toute une génération de cavaliers peut apprendre, auprès de ses disciples, ou dans ses livres une autre manière de dresser les chevaux.

           

Nuno Oliveira est un continuateur à la fois des « anciens », les classiques des XVII et XVIII siècles tels que Pluvinel et La Guérinnière, mais également de Baucher. Il est également l’un des fondateurs d’une nouvelle manière de dresser les chevaux qui s’oppose et se différencie de plus en plus du dressage de concours. Cette nouvelle manière est aujourd’hui représentée par l’école de la légèreté, fondée par Philippe Karl. Elle est représentée également par l’enseignement prodigué par beaucoup de anciens élèves du maître comme Denis Lahaye, Hélène Arianoff ou encore son propre fils Joao Oliveira.

 

 

 

Quelques uns de ses chevaux :

Euclide

Talar

Suante

Corsario

Bunker, lorsqu’il eut terminé le dressage de ce cheval Oliveira déclara « il est dommage que mon dos me lâche, je commençais à comprendre l’équitation ».

 

Quelques uns de ses élèves :

Joao Oliveira

Sue Oliveira

Michel Henriquet

Suzanne Laurenthy

Dom Diogo de Bragance

Bettina Drumond

Maxime Le Forestier

Jean-Louis Sauvat

Dany Lahaye

 

Principaux ouvrages (présentés par ordre chronologique) :

Haute école

Réflexions sur l’art équestre

Souvenir d’un écuyer portugais

Principes classiques de l’art de dresser les chevaux

Amalgame

Elucubrations

Souhaits et souvenirs

Propos d’un vieil écuyer aux jeunes écuyers

Les chevaux et leurs cavaliers

Propos sur des croquis équestres

 

Bibliographie :

Oliveira, Nuno, Œuvres complètes, Belin, 2008

Bragance, Dom Diogo, L’équitation de tradition française, Belin, 2005

Henriquet, Catherine et Michel, Comportements de dressage, Belin, 2009

Karl, Philippe, Dérives du dressage moderne, Belin, 2006

Henriquet, Michel, « L’art équestre », Encyclopédia Universalis, 2011

Filmographie :

Desprez, Laurent, Nuno Oliveira, l’écuyer du XX siècle, 24 images production, 2007

 

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